
Quand Benjamin Broustey a lancé sa première entreprise à impact, il n’avait aucune idée qu’il allait en créer cinq. Encore moins que chacune d’elles lui enseignerait une leçon cruciale sur la liberté, la peur, l’alignement et la patience.
Fondateur d’Ecopreneur et entrepreneur depuis 15 ans dans l’écologie pratique, il a cofondé le premier bureau d’études francophone dédié à la permaculture, créé un centre de formation sur sa ferme expérimentale, développé des activités dans l’éco-construction et la phytoépuration. Aujourd’hui, ses entreprises ont cumulé 6 millions d’euros de chiffre d’affaires sur les six dernières années et ont impacté plus de 500 000 personnes.
Voici les huit leçons essentielles qu’il partage de ce parcours.
1. L’alignement, c’est un cap, pas un point de départ
On croit souvent qu’il faut être parfaitement aligné pour se lancer. C’est faux.
Benjamin n’a jamais été aussi confus que quand il a lancé sa première entreprise. Il vivait alors dans un mobil-home pendant la construction de sa maison en paille, au RSA. Il a ensuite vécu deux ans dans une cabane sur sa ferme, puis trois ans dans une yourte.
Mais il avait une intuition forte : contribuer à la régénération du vivant. Et c’est en avançant qu’il a appris à se connaître. À comprendre ses moteurs, ses valeurs, ses zones d’excellence.
L’alignement se construit en marchant, en testant, en se trompant, en affinant. Pas en méditant pendant trois ans sans passer à l’action.
Cette clarté progressive lui a permis de passer d’une activité à l’autre sans jamais trahir sa vision initiale, mais en l’incarnant différemment selon les contextes et les besoins du marché.
Attendre d’être totalement clair pour se lancer, c’est une forme de procrastination déguisée. L’action révèle l’alignement, elle ne le suit pas.
2. On ne crée pas une entreprise, on crée un mode de vie
Ce que Benjamin n’avait pas anticipé au début, c’est à quel point créer une activité, c’est créer un quotidien.
Ce que vous faites, avec qui, à quel rythme, dans quel cadre, tout cela devient votre vie. Alors oui, c’est génial d’avoir de l’impact. Mais si vous bossez 60 heures par semaine, que vous vous isolez, ou que vous recréez un mini-burn-out dans votre salon, est-ce vraiment ça, la liberté ?
Cette prise de conscience a radicalement transformé sa manière de construire ses projets. Certaines semaines, il peut travailler intensément quand un projet le passionne. D’autres semaines, il peut s’absenter complètement parce que ses entreprises sont suffisamment structurées pour tourner sans lui.
La différence avec le salariat ? Il choisit. Son rythme, ses priorités, ses collaborateurs, l’équilibre entre vie professionnelle et personnelle qui lui convient à lui, selon ses besoins du moment.
L’écopreneuriat ne devrait pas être un sacrifice, mais une libération. C’est pour cette raison qu’il insiste autant sur le travail d’introspection en amont dans la méthodologie Ecopreneur.
Votre entreprise doit servir votre vie idéale. Que vous vouliez travailler 20 heures pour être présent avec vos enfants, 35 heures pour garder un équilibre, ou 50 heures parce qu’un projet vous passionne, c’est votre choix. Pas celui d’un patron ou d’un système.
Trop d’entrepreneurs écologiques reproduisent les schémas qu’ils fuyaient, simplement avec une étiquette verte. Ils s’imposent des rythmes épuisants par culpabilité ou par peur de ne pas être à la hauteur. C’est une erreur stratégique autant qu’existentielle.
3. Le plus difficile, ce n’est pas d’avoir des idées, c’est d’y croire assez longtemps
Des idées, Benjamin en a eu. Des bonnes, des moins bonnes. Ce qui a fait la différence, ce n’est pas leur qualité objective. C’est sa capacité à les porter dans le temps.
À travers le doute, la fatigue, les chiffres décevants, les incompréhensions autour de lui.
Quand il a lancé son centre de formation en permaculture, il a mis presque deux ans avant que l’activité devienne vraiment rentable. Pendant ce temps, il continuait à développer son autonomie sur sa ferme à mi-temps.
Le plus grand défi, ce n’est pas de trouver « la bonne idée ». C’est de ne pas lâcher trop tôt une idée porteuse, sous prétexte qu’elle ne décolle pas instantanément.
Cette patience stratégique demande un état d’esprit particulier. Il faut accepter que la croissance soit souvent exponentielle, pas linéaire. Les six premiers mois peuvent sembler décevants, puis soudainement tout s’accélère.
C’est aussi pour cette raison qu’il recommande de commencer petit, de maîtriser son système, puis d’étendre progressivement. Principes permacoles appliqués au business.
Mais attention : patience ne signifie pas acharnement aveugle. Il faut aussi savoir reconnaître quand une idée ne fonctionne vraiment pas et pivoter. C’est l’équilibre entre détermination et flexibilité qui fait la différence.
4. On peut vivre vraiment d’une entreprise éthique
Beaucoup pensent que pour gagner sa vie, il faut renoncer à ses valeurs. Benjamin l’a pensé aussi.
Jusqu’à ce qu’il voie ses premiers clients payer pour une offre alignée. Jusqu’à ce qu’il voie des projets qu’il trouvait « trop de niche » trouver leur public.
Ce qu’il a compris, c’est que l’argent n’est pas l’ennemi. C’est un carburant. Et quand il circule au service d’un projet juste, humain et durable, il devient même un vecteur de transformation.
Ses entreprises cumulent aujourd’hui 6 millions d’euros de chiffre d’affaires sur six ans. Elles emploient plus de 20 personnes. Elles permettent de réinvestir dans l’innovation, de soutenir des projets qui n’ont pas vocation à être rentables, de partager les surplus.
Cette abondance financière n’est pas une trahison des valeurs écologiques. C’est au contraire ce qui permet de démultiplier l’impact, d’inspirer d’autres personnes à suivre cette voie, de prouver qu’une économie régénératrice est viable.
Et cela ne nécessite pas forcément de viser des chiffres aussi importants. Certains écopreneurs se contentent de 30 000 euros annuels à mi-temps et sont parfaitement épanouis. D’autres visent 100 000 euros pour financer un projet de vie plus ambitieux. L’essentiel est que le revenu soit adapté à vos besoins et vos ambitions personnelles.
Le blocage avec l’argent est l’un des plus gros obstacles chez les aspirants écopreneurs. Tant que vous considérez l’argent comme le diable, vous ne pourrez pas construire une activité prospère. Et sans prospérité adaptée à vos besoins, votre impact restera limité, votre message fragile, votre durabilité compromise.
5. L’accompagnement change tout
Benjamin n’a jamais autant progressé que lorsqu’il s’est entouré. Pas de coachs « miracle », mais de pairs bienveillants, d’experts accessibles, de personnes qui comprenaient ce qu’il traversait.
Lui-même a investi plus de 100 000 euros en formations et accompagnements sur 15 ans. Chaque euro a été rentabilisé, non par miracle, mais parce qu’il appliquait rigoureusement ce qu’on lui enseignait.
Cette expérience l’a convaincu de créer Ecopreneur. Parce qu’il a vu trop de porteurs de projets s’épuiser seuls, alors que quelques bons repères peuvent tout changer.
L’isolement tue plus d’entreprises que le manque de compétences. Quand vous êtes seul face à un problème, vous ruminez pendant des semaines. Quand vous êtes dans une communauté de pairs, quelqu’un vous donne la solution en 20 minutes parce qu’il l’a déjà vécue.
Cette mutualisation de l’expérience accélère considérablement les résultats. Elle permet aussi de maintenir le moral dans les moments difficiles, de célébrer les victoires avec des gens qui comprennent vraiment ce qu’elles représentent.
Non, vous n’avez pas à tout savoir. Oui, vous avez le droit d’être accompagné. Se faire accompagner n’est pas un aveu de faiblesse, c’est une décision stratégique qui peut vous faire économiser des années de tâtonnements.
6. Il ne suffit pas d’avoir une mission, il faut apprendre à la traduire en action concrète
L’une des erreurs que Benjamin a faites, et qu’il retrouve souvent chez les écopreneurs en devenir, c’est de croire que la clarté de sa mission suffit à faire avancer le projet.
On peut avoir une vision magnifique, éthique, audacieuse, et rester bloqué parce qu’on ne sait pas comment la rendre concrète.
Ce qu’il a appris avec les années, c’est que la mission doit s’incarner dans des offres claires, compréhensibles, désirables, pour que les gens puissent y adhérer et contribuer.
Ce n’est pas renier sa mission, c’est lui donner une vraie chance d’exister.
Trop d’entrepreneurs restent dans le conceptuel. Ils parlent de leur vision, de leurs valeurs, de ce qu’ils veulent changer dans le monde. Mais quand on leur demande concrètement ce qu’ils vendent et à qui, le flou s’installe.
Cette traduction de la mission en offre commerciale est un art. Elle nécessite de comprendre profondément les besoins de son audience, de structurer une proposition de valeur claire, de créer un parcours client cohérent.
C’est exactement ce que la méthodologie Ecopreneur enseigne : comment passer de la vision à l’action, de l’intention au revenu, sans trahir ses valeurs mais en les rendant accessibles et désirables.
Et cette traduction peut prendre du temps. C’est normal de tâtonner au début, de tester différentes formulations, d’ajuster son offre selon les retours. L’important est d’avancer progressivement vers plus de clarté.
7. Ce n’est pas votre expertise qui compte le plus, c’est votre capacité à écouter
Dans plusieurs de ses projets, Benjamin s’est d’abord positionné comme « expert ». Il pensait qu’il fallait tout savoir, avoir les bonnes réponses, être légitime.
Et à chaque fois, la magie n’a pas opéré tant qu’il n’a pas changé de posture : celle de l’écoute active.
Ce sont les besoins réels des gens, leurs contraintes, leurs rêves, qui ont guidé les transformations de ses offres. Et c’est cette écoute sincère qui lui a permis de vendre sans jamais avoir à convaincre.
Le marketing éthique commence là : écouter profondément, pour répondre justement.
Il raconte souvent l’exemple de la création du premier bureau d’études francophone en permaculture. Au départ, il pensait vendre des designs complets de terrain. Mais en écoutant vraiment ses clients, il a compris qu’ils voulaient surtout être formés pour le faire eux-mêmes. L’offre a pivoté vers la formation, et tout a décollé.
Cette posture d’écoute nécessite de mettre son ego de côté. D’accepter que le marché ait parfois raison contre votre intuition initiale. De rester flexible dans l’exécution tout en gardant ferme sur la vision.
Les meilleurs produits et services naissent toujours de cette écoute empathique, pas d’une tour d’ivoire où l’expert décide seul de ce qui est bon pour les autres.
8. Ce qu’on vend, ce n’est pas juste un service, c’est une transformation
Une autre chose que Benjamin a comprise avec le temps, c’est que les gens n’achètent pas une séance, un atelier, une prestation. Ils achètent un avant et un après.
Un changement de perception. Une mise en mouvement. Un soulagement. Une capacité nouvelle.
Quand il a intégré cette dimension transformationnelle dans sa manière de communiquer et de structurer ses offres, tout a changé.
Vendre un design de permaculture, c’est transactionnel. Vendre la capacité de produire 80% de sa nourriture sur 1000m² en travaillant 2h par semaine, c’est transformationnel.
Cette nuance fait toute la différence dans la perception de valeur. Un client n’achète pas votre temps ou votre expertise abstraite. Il achète le résultat concret que cette expertise va produire dans sa vie.
C’est aussi ce qu’Ecopreneur transmet : comment articuler une proposition de valeur claire autour d’un vrai bénéfice pour l’autre, pas juste autour d’un « concept sympa ».
Trop d’entrepreneurs écologiques sous-vendent leurs offres parce qu’ils ne mesurent pas la valeur réelle de la transformation qu’ils permettent. Ils facturent leur temps, pas leur impact.
