Comment devenir horticulteur écopreneur : témoignages

Dans notre article précédent, nous vous présentions l’horticulture et ses multiples métiers.

Nous donnons maintenant la parole à 2 écopreneurs qui se sont lancés dans l’aventure : Magali, qui conçoit et anime des potagers permacoles pour fédérer dans les entreprises et les collectivités près de Lyon, et Mattias, qui a créé sa pépinière permacole chez lui en Belgique (il partagera son expérience avec ses propres mots). Une occasion pour vous de découvrir la variété d’activités qu’offre la filière de l’horticulture. Découvrez leurs parcours dans cet article !

Portrait d’écopreneuse : Magali Coavoux, le potager pour créer du lien

Le burn-out qui va tout déclencher

L’histoire de la reconversion de Magali commence comme celle de nombreuses personnes : un métier valorisé socialement et très prenant au sein d’un grand groupe de conseil, une perte de sens au travail, suivi d’un burn-out en septembre 2019. Quelques mois auparavant, Magali avait fait un bilan de compétences, ou plutôt un bilan de talent, qui se rapproche de l’ikigaï dans sa philosophie. Le lien entre les personnes, c’est ce que notre écopreneuse aime créer. Elle commence à s’intéresser à la permaculture humaine, qui prône les valeurs du bien-vivre ensemble, de la communication non-violente, à travers entre autres l’utilisation de la PNL (programmation neuro-linguistique). Cependant, le projet manquait de concret pour Magali. 

Une reconversion en lien avec la nature

En janvier 2020, elle découvre le programme Écopreneur, qui lui permet d’aligner ses valeurs écologiques, humaines et entrepreneuriales. En août de la même année, elle se forme à la permaculture via Permaculture Design et obtient en parallèle un Cours Certifié de Permaculture (CCP). Une fois son diplôme obtenu, Magali se tourne vers les jardins participatifs et les maraîchers pour mettre en pratique ses connaissances et affiner son projet. Elle continue ensuite de se former (via Ver de Terre Production) et de s’informer, de tester et d’observer sur le terrain.

Un projet pour fédérer autour du potager

Aujourd’hui, Magali a lancé son activité et son site internet, Graine de Liens, et est rattachée à Cap Services, une coopérative d’emploi de la région lyonnaise. Elle crée et anime des potagers permacoles auprès de collectivités (entreprises, écoles, hôpitaux ou maisons de retraite). Elle peut ainsi fédérer et créer du lien entre les gens, une activité éthique et régénératrice chère à son cœur. Magali enseigne également les bases de la permaculture et de l’écologie à ses compagnons de potager. Ensemble, ils analysent le contexte de climat et de sol, dessinent et conçoivent le potager permacole. Elle travaille aujourd’hui avec 2 hôpitaux psychiatriques et entend bien développer son activité autour de Lyon.

Devenir pépiniériste, l’étape d’après

Son prochain projet en horticulture ? Créer une pépinière d’arbres champêtres à Poleymieux, dans les Monts d’Or. Elle souhaite aussi collaborer avec le label « Végétal Local », dont la mission est de renaturer les zones dénaturées par l’homme, en utilisant et en traçant des végétaux sauvages et locaux. Elle entend ainsi planter des légumes perpétuels, des arbres nourriciers et autres végétaux comestibles pour alimenter des projets locaux.

La médiathèque de Magali Coavoux : Livres sur l’horticulture et plus de ressources

• La révolution d’un seul brin de paille, de Masanobu Fukuoka (ouvrage sur l’agriculture sauvage mais également philosophique)
• Permaculture humaine – Des clés pour vivre la Transition, de Bernard Alonso et Cécile Guiochon
• Faire ensemble: Outils participatifs pour le collectif, de Robina McCurdy
• La Permaculture au jardin mois par mois, de Damien Dekarz (ainsi que sa chaîne Youtube Permaculture, Agroécologie etc.)
• Le Jardin d’Émerveille, chaîne Youtube de Rémi Kulik
• Reinventing organizations, de Frédéric Laloux

Vous trouverez plus de ressources vidéo sur le site de Magali.

Parole d’écopreneur : Mattias Fontaine, le jardin-forêt pour régénérer la planète

Mattias, qui a créé sa pépinière permacole chez lui en Belgique, partagera son expérience avec ses propres mots.

Mon projet d’entrepreneuriat en agroforesterie

Je suis Mattias Fontaine, j’ai 30 ans et je vis près d’Arlon en Belgique (province du Luxembourg).

J’ai choisi de me lancer pleinement dans l’agriculture début 2020, et je me suis spécialisé quelques mois plus tard dans l’agroforesterie et la pépinière. Mon projet « Les Bois d’Abondance » sera officiellement créé en novembre 2021. Il s’agit d’une pépinière permacole spécialisée pour l’agroforesterie. J’utilise déjà le modèle de jardin-forêt, pour lequel j’associe plusieurs strates de végétaux : de grands arbres, des arbres plus petits à leur pied, des arbrisseaux et des cultures autour, puis des racines au sol. C’est donc une forêt comestible !

Ma production horticole

Sur place, j’ai une production horticole : plants d’arbres, arbustes, arbrisseaux, lianes, herbacées, aromatiques et médicinales. Dans un premier temps, je fais un focus particulier sur les aromatiques et médicinales, les herbacées, ainsi que sur les arbres utiles en agroforesterie. Je compte ainsi commencer par la vente de légumes vivaces, d’aromatiques et de médicinales. Pour les plants d’arbres et arbustes, c’est plus long : il faut attendre de 1 à 3 ans pour commencer l’exploitation.

J’ai également une production diversifiée issue du système agroforestier en place et du jardin-forêt : légumes, fruits, petits fruits, tisanes et certaines transformations.

Mon terrain de 1ha est complètement autonome en eau et en énergie, grâce à un bassin de rétention (en cours de creusage) et des panneaux solaires. Je suis aujourd’hui indépendant complémentaire, mais je me lance à temps complet d’ici 1 an !

À côté de ça, je travaille également en partenariat, dans le cadre d’une coopérative : « Canopée, coopérative en agroforesterie », dont le but est de promouvoir l’agroforesterie. Ce projet fera notamment graviter des apprenants en formation autour des différents projets qu’hébergera la coopérative.

Une envie de retour aux sources

J’ai initialement un diplôme en coopération internationale. Ces études m’ont petit-à-petit amenées à considérer l’agriculture comme une des bases de notre civilisation. Mais également amené au constat qu’il y avait un décalage entre notre mode de production et l’équilibre avec notre environnement. C’est lors d’un stage dans une ferme en Inde que j’ai vraiment eu le déclic d’un retour à la terre. J’avais eu l’occasion de découvrir Vandana Shiva (grande activiste à la tête de l’association pour laquelle j’ai fait ce stage) dans le film « En quête de sens ». 

Mes formations en permaculture et en entrepreneuriat écologique

À mon retour, j’ai d’abord fait de la sensibilisation à l’environnement dans une ferme d’animation, mais ça ne me suffisait pas. J’avais besoin de mettre vraiment et entièrement les mains dans la terre, de me reconnecter plus profondément avec la nature (comme expliqué plus haut). J’ai donc quitté mon emploi avec quelques économies en 2019, pour me former à l’agroécologie et à la permaculture. J’ai fait un PDC (Permaculture Design Course ou Cours de Conception en Permaculture) à la Ferme de Desnié, en Belgique. J’ai aussi effectué des formations en ligne, dont Ecopreneur et Permaculture Design. 

J’ai été Berger Fromager Maraîcher bénévole pendant 10 mois, en parallèle avec un autre projet permacole. Et sur le chemin j’ai rencontré le concept de jardin-forêt, et le plaisir de multiplier les plantes, qui m’ont amené jusqu’ici. 

L’année passée, j’ai fait une formation pratique de 10 mois en horticulture, plus spécifiquement en arboriculture et agroforesterie. Le magnifique coup de pouce du programme Écopreneur, de Benjamin et Aurélie, ainsi que de toute cette communauté, me permettent de lancer aujourd’hui ce magnifique projet, qui est à mi-chemin entre un aboutissement et un grand départ !

Même s’il n’y a aucun pré-requis pour exercer dans l’horticulture en Belgique, il est intéressant d’obtenir les cours A et B agricoles (l’équivalent du BP REA en France), qui permettent d’obtenir des avantages et aides pour son exploitation.

Ma journée d’horticulteur pépiniériste

Généralement, je me réveille plutôt tôt, et je commence par checker ma boîte mail et ma page Facebook. Je pars ensuite sur le terrain, vérifie que les poules et les canards vont bien, puis en fonction des conditions météo et de l’état des plants de cultures, j’organise ma journée : 

• préparation des planches de culture ;
• entretien général type désherbage, etc. ;
• semis, bouturages, greffes ; 
• soin aux plantes (arrosage, traitements naturels, petites tailles, …) ; 
• préparation des commandes, du marché, du point de vente ; 
• accueil fournisseurs ; 
• gestion des stocks ;
• etc.

S’ensuivent un peu de travail administratif (gestion, communication, …) et du rangement. J’ajuste le planning en fonction des semaines et de la météo. J’adore pouvoir faire les choses comme je l’entends : ne pas avoir d’horaire imposé, laisser libre court à mes envies, à mes idées, tester, etc. J’aime être mon propre patron. Et j’aime aussi avoir des temps où je ne dois composer avec personne d’autre que moi-même. 

Puis j’adore le fait de concevoir un projet dans sa globalité, et de l’imprégner de toutes les valeurs que je porte. Par contre je suis vraiment content d’avoir aussi ce projet de coopérative, qui me permet d’avoir aussi les plaisirs du travail en équipe.

Horticulteur : Un métier au contact de la nature passionnant

J’aime énormément les plantes et leur reproduction. Je trouve ça à la fois magique, fascinant, reposant, méditatif, plein de sens, et très utile. J’adore travailler dehors, en plein air, avec mes mains et mon corps, pas seulement ma tête. Je trouve le monde des plantes fascinant et incroyable : on peut apprendre tellement de choses d’elles. C’est aussi très important pour moi de me sentir intégré à mon environnement, d’être en harmonie avec mon écosystème, de me sentir aller dans son sens, dans une direction commune. J’ai envie de permettre à d’autres de cultiver la biodiversité, leur propre abondance, de même que leur bien-être en harmonie avec la nature !

C’est aussi pour ça que je trouve l’agroforesterie et le principe de jardins-forêts tellement passionnants. Ce sont des systèmes qui vont dans le sens de la nature, étant donné que dans nos régions de climat tempéré, une zone laissée à « l’abandon » évoluera naturellement vers l’état de forêt. C’est son climax.

La permaculture m’a beaucoup inspiré dans ce sens, notamment Gilles Clément (auteur de « jardinier des limites ») dont le travail est à découvrir. 

Un projet évolutif et ambitieux

Une offre élargie et accessible en ligne

Dans un futur proche, je pense premièrement élargir et améliorer l’offre quant à la gamme de plants que je veux proposer, avec également du matériel pédagogique et théorique. Je souhaite mettre en place la vente en épicerie collaborative, sur les marchés, ainsi que la possibilité de commander en ligne, avec livraisons dans un périmètre proche ou possibilité de venir chercher sur place.

Des formations en agroforesterie et en permaculture

Par la suite, je compte organiser plus de formations autour de l’agroforesterie et de la permaculture, ainsi que des visites et petits voyages didactiques. J’espère m’associer l’année prochaine avec un maraîcher herboricole pour lancer une formation sur les forêts-jardins. Le projet « Canopée, coopérative en agroforesterie » pourrait être un tremplin dans cette direction. La coopérative est en train d’acquérir un terrain avec un bâtiment qui pourrait héberger à termes des formations en agroforesterie et en permaculture, et héberger des porteurs de projets indépendants.

Amener le concept de jardin-forêt auprès des particuliers et des collectivités

J’aimerais beaucoup pouvoir initier ou en tout cas accélérer d’autres projets de jardin-forêt, particuliers et citoyens, notamment en collaboration avec les écoles, les villes et les communes… Tous ces projets sont pour moi très complémentaires et se nourrissent entre eux. Mais chaque chose en son temps !

Les qualités essentielles pour devenir horticulteur

Selon moi, il est primordial d’aimer ce métier, d’autant qu’il ne rapporte pas beaucoup au début. Il faut également être bien organisé et ne pas s’éparpiller. C’est essentiel d’avoir un plan d’actions et un plan de culture bien ficelés. Il faut savoir arrêter une décision et s’y tenir. C’est pour ça que j’insiste sur l’organisation et la planification, qui aident à maintenir un cap même avec les aléas de la nature. Le programme Ecopreneur a été une belle aide pour moi dans cette tâche.

Ensuite, il faut être consciencieux, car la qualité des plants et la santé de la production en dépendent fortement. Un travail fait à la va-vite peut mener à la perte totale de temps et d’énergie.

Aussi, il me semble évident qu’il faut être ouvert et disponible pour les gens, développer un conseil-client de qualité et assurer une belle visibilité sur les points de vente. En tout cas pour moi qui pense vendre en grande partie à des particuliers. Beaucoup de professionnels produisent bien plus que ce qu’ils ne sont en mesure de vendre, ce qui revient encore à une perte de temps et d’énergie.

Enfin, il faut savoir garder un temps pour le projet, et un temps pour ses proches ! Si le projet a tendance à trop tourner dans la tête, je dis stop, je passe du temps avec ma famille et mes amis, et je reprends le lundi !

Une aventure rendue possible grâce à Ecopreneur

Grâce au programme de formation à l’entrepreneuriat écologique, j’ai pu prendre la décision définitive de me lancer ! 

J’ai acquis une belle vision globale de ce qui gravite autour de la création et de la gestion d’un projet, agrémentée de points de vue détaillés sur le métier d’entrepreneur ainsi que d’outils de gestion concrets.

Je n’ai pas encore fini toute la formation car les choses se sont accélérées très vite pour moi depuis la décision de me lancer, mais je suis impatient de prendre le temps de continuer en profondeur cet hiver. J’ai encore 1 an pour bien fignoler tout ça et je suis ravi d’avoir un tel accompagnement pour m’aiguiller et me permettre de faire les choses vraiment bien !

Je trouve vraiment efficace le mélange entre le côté pragmatique de Benjamin et le côté psychologique d’Aurélie. Les deux se confondent et forment un cocktail de qualité ! Le pragmatisme devient psychologique et la psychologie devient pragmatique. Personnellement ça m’a rassuré, poussé vers l’avant, donné un nombre incalculable d’idées et une manière de les concrétiser, offert un point de vue « méta » sur le projet, poussé à avancer de manière structurée et mesurée, pas à pas. J’ai eu de belles opportunités notamment à travers le réseau et la communauté, et je ne suis pas au bout de mes surprises.

Alors, merci !

Mon message pour les lecteurs

Let’s go !!! On en a besoin ! Il y a de la place, et on ne sera pas de trop pour régénérer la planète ! Croyez en votre idée, peaufinez-la et mettez toutes les chances de votre côté pour y arriver ! Personnellement je suis convaincu du pouvoir de l’intention !! Et vous êtes les bienvenus pour échanger ! 

Livres sur l’horticulture et autres ressources : les recommandations de Mattias Fontaine

Ouvrages

• La forêt-jardin, de Martin Crawford (un incontournable !!)
• Forêt comestible & haie fruitière – Créer un jardin nourricier multi-étagé, d’Antoine Talin
• Créer un jardin-forêt, de Patrick Whitefield
• La biodiversité, amie du verger, d’Evelyne Leterme
• De la taille à la conduite des arbres fruitiers, d’Evelyne Leterme
• Le livre des arbres, arbustes et arbrisseaux, de Pierre Lieutaghi
• Le verger bio, arbres et arbustes, de Alain Pontoppidan
• Les arbres nourriciers et médicinaux, de Karin Greiner
• Permaculture en climat tempéré, de Franck Nathié
• La production en pépinière, de Pierre Michelot
• La pépinière, de Charles Baltet

Formations horticoles et ressources en ligne

https://universite-alveoles.fr/

https://www.permaculturedesign.fr/